L'Inde, une démocratie qui Modi la liberté de la presse

Classement RSF : 140ème sur 180 pays

AFP

Lorsque nous parlons de l’Inde a un public occidental, les éléments qui lui seraient associés sont culturels comme le Taj Mahal, le Bollywood ou le curry. Mais pourtant, ce que nous avons vu de l’Inde en l’étudiant pour ce dossier qui rend compte de la liberté de la presse, ce sont les émeutes intercommunautaires, la censure journalistique et les discriminations en tout genre. Le pays considéré comme la plus grande démocratie du monde, simplement par sa taille, n’est que le 140ème pays sur 180 au classement Reporters Sans Frontières. Nous avons vérifié si cette place en bas du classement est mérité pour le deuxième pays le plus peuplé du monde. L’actualité est largement fournie ces derniers temps avec l’instauration d’une loi sur la citoyenneté très controversée.

Nous avons abordé la liberté de la presse sous plusieurs angles qui concernent les évènements récents. D’abord, il est essentiel de comprendre la complexité de la loi dont tout le monde parle et qui sera déterminante pour l’avenir des minorités religieuses du pays. Des lois qui sont mises en application par le pouvoir en place, dirigé par le Premier Ministre Narendra Modi. Si l’on peut faire une différenciation de traitement entre les journalistes étrangers et nationaux c’est parce que les relations diplomatiques sont très importantes pour le gouvernement. Il est bien sûr évident pour nous et dans l’intérêt de la compréhension de nos propos, de rendre compte du paysage religieux indien et ses enjeux, notamment politiques. Enfin si nous parlons de discriminations, il reste un problème évident dans la société indienne : celui des castes qui malgré leur abolition, sont une caractéristique de ce pays. 

Sous le joug d’une juridiction très oppressante

Par Tom Menetrey

Depuis quelques mois, deux mesures juridiques adoptées par le gouvernement nationaliste font parler d’elles au sein de la société indienne : le Registre National des Citoyens (RNC), un outil administratif servant à identifier les « citoyens légaux », et la nouvelle loi sur la citoyenneté (le Citizenship Amendment Act, CAA). Le 11 décembre dernier, le parlement indien adoptait une nouvelle modification de loi sur la citoyenneté. Ce changement vise à faciliter l'obtention de la citoyenneté indienne pour les réfugiés du Bangladesh, du Pakistan et d’Afghanistan, s'ils sont de confession hindouiste, sikhe, bouddhiste, jaïniste, parsie et chrétienne, arrivés avant 2015 à l'exception des musulmans. Une soixantaine de requêtes contestant la validité de cette loi adoptée avaient été déposées devant cette haute juridiction qu’est le Parlement, réclamant la suspension immédiate de ce texte accusé d'être discriminatoire envers les immigrés musulmans. Par la suite, lors d'une audience très rapide, trois juges de la Cour suprême n’ont pas accepté de surseoir à la mise en œuvre de la loi sur la citoyenneté.

De grandes manifestations se sont passées dans plusieurs États du pays, mais aussi sur des campus universitaires, pour contester la CAA, le Citizenship Amendement Act. Des partis d'opposition et des manifestants ont appelé la Cour suprême à la suspendre, affirmant qu'elle contrevenait aux principes laïques inscrits dans la Constitution de 1950. Les articles 14 et 15 de la Constitution reconnaissent l’égalité devant la loi de toute personne résidant en Inde, indienne ou étrangère, quelle que soit sa religion. Selon le député du Parti du congrès (centre gauche) Shashi Tharoor, accepter de naturaliser des personnes appartenant à certains groupes religieux seulement représente « une trahison de l’idée fondatrice de l’Inde ».

Cette nouvelle loi a fait parler d’elle en très grande partie dans la rue, avec les manifestations, mais aussi dans les médias. La majorité du paysage médiatique, qu’il soit local ou étranger, n’a pas eu de mal à discuter de cette loi au sein de plusieurs articles. Le web étant l’un des secteurs les moins surveillés par le gouvernement indien, les médias (surtout locaux) ont pu en profiter pour informer leur lectorat sur la situation actuelle en Inde.

Dans ses articles, Slate relate les faits avec la vision du peuple indien, révolté face à cette nouvelle loi, soutenue par le ministre de l'Intérieur Amit Shah et le Premier ministre Narendra Modi, tous deux issus du Bharatiya Janata Party (BJP), au pouvoir. Slate démontre tout d’abord les problèmes en ne citant que les citoyens et leurs arguments. Pour enfoncer le clou, le journal raccroche le sujet à d’autres polémiques du pays (apatrides, morts…) et montre par la suite, les “solutions” qu’ont trouvées les manifestants, et parmi elles, le nouveau patriotisme. Sur le site web de la télévision qatari, AlJazeera, nous retrouvons un article plutôt simple, mais qui cite beaucoup de personnalités indiennes. Nous pouvons noter la présence du juge en chef Sharad Arvind, le ministre de l'Intérieur Amit Shah et le porte-parole du BJP, GVL Narasimha Rao. Des personnages institutionnels auxquels AlJazeera apporte beaucoup de lignes dans son article. Le quotidien TheHindu ne se mouille pas et présente le sujet de la même façon : simple, mais avec des interlocuteurs hauts placés, en faisant de l’ombre aux protestataires… Surprise (ou non), le Time décide de commencer son article par une accroche pro-manifestants : Kerala est le premier État d’Inde à contester le CAA. Le journal continue ensuite par un bon paragraphe d’explications sur ce fameux Citizen Amendement Act. Notons aussi que le Time met en avant les déboires de la police indienne avec une vidéo d’étudiants protestataires passés à tabac par les forces de l’ordre, tout en rappelant le nombre de morts depuis le début des manifestations, qui s’élève aujourd’hui à 50. Là encore, la presse plus internationale n’hésite pas à démonter le CAA avec toutes sortes d’arguments. Une fois de plus, la presse internationale fait briller les protestants. Le WashingtonPost propose 5 choses à savoir concernant cette polémique. Ces 5 choses parlent sous différents aspects des manifestants.

« Tous les médias ont été touchés par cette répression, c’était général, ils ne voulaient pas du tout de journalistes témoins », voilà ce que déclare Sébastien Farcis, correspondant pour Radio France Internationale (RFI) en Inde. La crise du Cachemire et les violences de Dehli, ce sont les deux derniers événements que retient le journaliste lorsque nous l’interrogeons sur la liberté de la presse en Inde. « Il y a une réelle politique de terreur sur nos couvertures des manifestations. Il y a une grande partie des médias qui n’osent pas aller à l’encontre du discours ambiant », déclare le correspondant. Le journaliste s’estime « chanceux » d’être un journaliste français travaillant pour des médias pas très influents en Inde. Sébastien Farcis nous explique également que les grands médias anglophones tels que la BBC sont très souvent « critiqués » par le gouvernement et reçoivent des visas d’une durée raccourcie lors des renouvellements. Du côté pénal, les poursuites en justice sont très souvent utilisées pour empêcher les journalistes trop critiques à l'encontre des autorités de parler, en rapport à la section 124A du Code pénal, qui condamne de prison à perpétuité les personnes coupables de “sédition”, c’est-à-dire l'incitation à l'émeute, à la révolte et/ou au soulèvement contre la puissance établie.

Lundi 16 décembre, le gouvernement a sévi en faisant entrer en vigueur la section 144 du code de procédure pénale. Cette décision interdit tout rassemblement d'au moins quatre personnes, et a été déployée dans les plus grands foyers d’Ahmedabad, Bangalore et Mangalore. LeFigaro ne se démonte pas et décrit très clairement la situation terrifique qui se déroule actuellement en Inde. Entre les manifestations qui tournent au vinaigre et la suspension des réseaux téléphoniques à Dehli, le journal n’hésite pas à remuer le couteau dans la plaie, et les autres médias occidentaux font de même. « Les seuls médias qui osent se positionner contre le discours ambiant sont indépendants du gouvernement, car les médias sont financés en grande partie par le gouvernement lui-même. » Nous explique Sébastien Farcis, correspondant pour RFI en Inde. The Logical Indian en est un exemple, le journal se définit comme étant indépendant et à intérêt public, et n’hésite pas à publier des articles à charges contre le gouvernement nationaliste indien. The Times of India en est le contraire, de simples articles explicatifs concernant la section 144 et sa mise en place dans différentes zones. Le journal IndiaToday informe même de la punition qui est réservée aux personnes qui oseraient violer cette juridiction.

Le gouvernement Modi, le mauvais ami des journalistes

Par Flavie Thivol

Le gouvernement indien est dirigé par Narendra Modi (depuis 2014), le Premier ministre provenant du parti Bharatiya Janata Party (BJP). Ce parti devient le principal depuis 1999, reprenant l’avantage sur le Congrès, anciennement leader devenu parti d’opposition. En mai 2019, Modi est réélu pour un deuxième mandat de 5 ans. Le système politique du pays est inspiré du régime britannique, un héritage qu’il garde de l’époque coloniale. Le président de la République est Ram Nath Kovind (depuis le 27 juillet 2017) et n’a qu’un rôle cérémonial, au même titre que la Reine Elizabeth II. Tout comme les États-Unis, l’Inde est composée de plusieurs états fédéraux et donc avec une indépendance judiciaire. C’est ce qui rend encore plus complexe le cas des régimes spéciaux notamment pour la nouvelle mesure du Citizenship Amendment Act (CAA), prise le 11 décembre 2019.

C’est un projet de longue date du Premier ministre Narendra Modi. Il avait déjà tenté de faire réviser cette loi déjà existante dans son premier mandat de 2014 à 2019. Une fois réélu, il n’a pas hésité à le faire directement. C’est donc sept mois après les élections, soit en décembre, que son ministre de l’intérieur décide de réviser le Citizenship Amendment Acts de 1955 une fois de plus. Cette loi intervient donc après la réélection de Narendra Modi en tant que Premier ministre. Un moyen encore plus fort de réprimer la communauté musulmane déjà exclue du pays avec la loi sur la citoyenneté conjointe à celle-ci. Pourtant Narendra Modi l’assure « la loi n’a rien à voir avec les musulmans nés en Inde, dont les ancêtres sont des enfants de la mère patrie », rapporte le quotidien The Hindu après son discours public le 22 décembre 2019.

Des manifestations ont alors éclaté dans les régions concernées par le Citizenship Amendment Act, c’est-à-dire le recensement de la population indienne dans l’état d’Assam (frontalier avec le Bangladesh) et la loi citoyenneté. Cette combinaison de deux lois touche également la région du Cachemire (au nord de l’Inde, frontalière avec le Pakistan et la Chine) connue pour ses nombreux conflits. Ce sont les étudiants qui se sont révoltés en premier contre cette loi, qu’ils ont jugé profondément discriminatoire envers la communauté musulmane. Les révoltes ont donc débuté dans les campus avant de s’étendre dans tout le pays et en particulier dans les grandes villes. Ces manifestations ont été caractérisées par la violence de la police indienne. Alban Alvarez, correspondant pour France 24 en Inde depuis 6 ans, pense que « si la police n’était pas entrée de force dans la Jamia Millia Islamia (une université musulmane [NDLR]) à Delhi et n'avait pas tapé sur les étudiants, ça ne se serait pas autant étendu sur le pays et il y aurait eu moins de violences dans les manifestations qui ont suivi ».

Les régions de l’Assam et du Cachemire sont particulières puisqu’elles sont aux extrémités de l’Inde. Dans le cas de l’Assam, elle représente la terre d’accueil des réfugiés bengalis. Pour le Cachemire, c’est un point stratégique entre le Pakistan et la Chine. Une source de conflits depuis 70 ans puisque chacun de ces pays revendique une partie ou l’intégralité du territoire.

En mars 2019, l’État a décidé d’abroger l’article 370 de la constitution qui donne une certaine autonomie et indépendance à Jammu-et-Cachemire. La région sera désormais directement dirigée par Delhi. Cette zone est fortement militarisée (considérée comme « la plus militarisée de la planète » par Reporters Sans Frontières) et c’est une des raisons pour lesquelles les journalistes étrangers y sont interdits. Pour la région de l’Assam, c’est plus particulier. La région est interdite aux journalistes étrangers depuis août, c’est-à-dire au moment où la population allait se faire recenser suite à la loi CAA. Alban Alvarez admet que la rédaction de France 24 a choisi d’envoyer des journalistes indiens dans cette zone, car les correspondants étrangers n’y avaient plus accès. « Il faut attendre 6 à 8 semaines pour un permis », au final ils ne l’obtiennent pas.

Un autre problème reste majeur dans l’exercice de la pratique journalistique : celui des coupures internet (internet shutdown en anglais). Selon Akshaya Kumar, directrice du plaidoyer sur les situations de crise de Human Rights Watch, l’Inde serait le pays qui a le plus recours à cette pratique. Entre 2012 et 2020, le gouvernement indien a procédé à 384 coupures dans tout le pays. On enregistre les plus gros chiffres en 2018 avec 134 et en 2019 avec 106. Elles frappent les zones déjà sensibles par des conflits historiques, comme dans la région du Cashmere. La plus longue coupure est la dernière arrivée dans la région de Jammu et Kashmir. Elle a duré au total 214 jours (du 4 août 2019 au 4 mars 2020). Les coupures concernent les lignes fixes et mobiles ainsi que les câbles et la télévision, ce qui empêche les journalistes locaux de faire leur travail convenablement et la population de communiquer avec l’extérieur. Les autorités justifient ce choix qui permettrait d’éviter des « pertes en vie humaine » pendant une période de crise.

Un total blackout, mais qui a laissé place à quelques exceptions. L’AFP a rapporté que les 250 journalistes accrédités sur la région ont dû, tout au long de cette période, se rendre dans la grande ville de Srinagar, dans des centres gouvernementaux. Là-bas, ils avaient accès à 10 ordinateurs pour une durée de 15 minutes par personne, ce qui est vraiment peu pour le nombre conséquent de journalistes. Sophie Landrin, correspondante au Monde, précise qu’en décembre, le gouvernement qui avait coupé internet dans dix autres districts de l’Assam avait également instauré un couvre-feu dans la grande ville de Guwahati.

Ces coupures sont vues comme un vrai fléau puisqu’au-delà d’être un moyen d’empêcher les journalistes de travailler, l’État bafoue également les libertés individuelles.

Enfin, il y a un autre moyen plus visible et « officiel » de réprimer les journalistes : les actions policières dans leur ensemble. Les journalistes qu’ils soient internationaux ou nationaux sont les cibles des autorités dans les manifestations. « À deux ou trois reprises la police m’a interdit de me rendre sur place, mais ce n’est pas une interdiction avec arrestation, il y a toujours moyen de contourner », confie Alban Alvarez. Si pour lui il n’y a pas eu vraiment de problème dans la couverture des manifestations et des conflits à Delhi, c’est parce qu’il n’y a pas besoin d’autorisation de tournage. Pourtant, Sébastien Farcis, correspondant pour RFI et Libération, affirme que tous les médias étaient visés lors des violences de fin février dans la capitale. « Un journaliste s’est fait tirer dessus et 5 journalistes ont été blessés… Les hindouistes ne nous aiment pas ! » conclut-il.  Toutes fois, nous ne pouvons pas dire que la police réserve le même sort aux journalistes internationaux et nationaux.

Ces derniers subissent une violence particulière de la part de la police, mais aussi de la population et des partisans du BJP. Ces violences se sont fait particulièrement ressentir au début des manifestations. Reporters Sans Frontières rapportent plusieurs agressions  en décembre sur des journalistes, mais aussi des correspondants. Le 17 décembre, Azaan Javaid, journaliste à The Print et Anees Zargar du quotidien numérique NewsClick se sont fait violemment agressé lorsqu’ils couvraient les manifestations à l’Université islamique de Srinagar. Leur matériel a été saisi et malgré leur défense en montrant leur carte de presse, ils ont été insultés et battus par deux policiers. Deux jours avant même schéma pour deux journalistes qui ont également subi ces violences policières. La correspondante de la BBC Bushra Sheikh couvrait les manifestations à l’Université Jamia Milia Islamia de New Delhi. Plus grave encore, le journaliste indépendant Saheen Abdullah a tenté d’aider une jeune femme asthmatique à sortir de la manifestation, mais s’est fait lui-même battre par la police. Avec de nombreuses blessures, il essaye de se rendre à l’hôpital avant d’être de nouveau agressé dans son rickshaw (taxi indien). Alban Alvarez, constate que les journalistes free-lance sont la cible privilégiée pour la police indienne.

L'agression de Azaan Javaid au Cashmire. ©Twitter : Azaan Javaid

L'agression de Azaan Javaid au Cashmire. ©Twitter : Azaan Javaid

Plusieurs moyens pour le gouvernement de Modi d’empêcher les journalistes de faire leur travail. Qu’il s’agisse des coupures internet ou l’exclusion médiatique d’une zone, il ne bafoue pas seulement la liberté de la presse, mais aussi les libertés individuelles. Pourtant l’Inde est considérée comme la plus grande démocratie du monde, de par sa taille, et un modèle pour l’Asie Pacifique. Si les journalistes étrangers restent plus ou moins épargner par les violences policières, « globalement, on peut faire notre métier, on n’est pas en Chine, enfin pas encore » précise Alban Alvarez, les journalistes locaux sont la cible du gouvernement.

Narendra Modi, premier ministre depuis 2014. ©Wikipédia

Narendra Modi, premier ministre depuis 2014. ©Wikipédia

Nombre de coupures internet par état entre 2012 et 2020.

Nombre de coupures internet par état entre 2012 et 2020.

Agression des étudiants de l'Université de Jamia Millia à New Delhi début décembre. ©France 24

Agression des étudiants de l'Université de Jamia Millia à New Delhi début décembre. ©France 24

Pris en étau entre menaces virtuelles et attaques physiques

Par Martin Bobet

« Les médias télévisuels et radiophoniques anglophones sont les plus touchés par les difficultés de renouvellements de visa […] la BBC se sent sur la sellette », explique Sébastien Farcis, correspondant pour RFI en Inde depuis neuf ans. Le gouvernement indien musèle les médias les plus lus en Inde pour désinformer le plus de monde. Au moment où Modi est arrivé, le groupe de presse le plus riche a acheté d’autres groupes de presse. La ligne éditoriale a été modifiée. Les médias de l’opposition se sont sentis obligés de mettre de l’eau dans leur vin. Le paysage médiatique indien se divise donc en 3 catégories selon le journaliste : la partie achetée et contrôlée, la partie qui garde le silence et le « ventre mou » qui essaye de continuer à critiquer le gouvernement. La plupart des médias indiens ne communiquent pas par rapport à l’armée.  

La télévision, le média le plus consommé a envahi le visage médiatique indien. Dans les régions d’Inde où les langues régionales sont les plus utilisées, les chaînes de télévision se permettent d’influencer les masses grâce à de la propagande.

Les journalistes internationaux commencent à se rassembler pour plus de liberté dans leur mobilité. Les états du Nord (Cachemire, Panjab et Bihar) leur sont fortement déconseillés.  « Les Indiens deviennent comme les Chinois », affirme le journaliste. La plupart des régions frontalières requièrent un permis pour effectuer leur travail journalistique. Sébastien se sent pourtant moins contrôlé vu qu’il travaille en français. Néanmoins, la co-autrice de son reportage télévisuel n’a toujours pas obtenu de visa.

Sur le front pénal, les poursuites en justice sont souvent utilisées pour museler les journalistes trop critiques vis-à-vis des autorités, en vertu notamment de la section 124A du Code pénal, qui punit de prison à perpétuité les personnes reconnues coupables de sédition. La simple menace d'accusation suffit donc à instaurer l’autocensure.

Sur Twitter, la plupart des journalistes portant un point de vue peu ou pas nationaliste dans leurs écrits reçoivent une flopée d’insultes et de menaces. Le BJP a même embauché des soldats « trolls » pour semer la terreur sur les réseaux sociaux. La plupart du temps, les rédactions n’offrent pas vraiment de sécurité à ses employés. Tout journaliste ayant porté une opinion alternative à la doxa dominante indienne peut se faire agresser dans la rue s’il se fait reconnaître.

Certaines professions nécessitent un visa de type « journaliste ». Les secteurs d’activité concernés sont : cinéma, télévision, médias, rédaction, publication, édition, presse, photographie, communication et publicité. Certains de ces domaines portent quand même à confusion quant à leur rapport avec le journalisme. Lors de nos recherches, nous sommes tombés sur un graphiste qui avait été contraint de demander ce genre de visa pour effectuer son travail en Inde.

De manière générale, l’Ambassade de l’Inde à Paris délivre un visa valide pour une durée de 3 mois, entrée simple. Ce visa n’est ni échangeable ni renouvelable en Inde. Soit dit en passant, l’Inde renouvèle très peu les visas journalistiques des correspondants. Les autorités indiennes accordent une attention énorme aux travaux des journalistes étrangers qui travaillent sur leur territoire, elles se permettent alors de ne pas renouveler les visas à ceux qui ne vont pas dans leur sens et ceux qui ne sont pas en phase avec leurs opinions.

Un « journaliste » se rendant en Inde à but touristique ou personnel doit impérativement faire une demande de visa journaliste et non pas une demande de visa touriste. Cependant, la seule démarche supplémentaire consiste à remplir une attestation certifiant que le demandeur n’exercera pas d’activité professionnelle lors de son séjour en Inde. Une demande de visa peut être acceptée, modifiée ou refusée de plein droit par l’Ambassade de l’Inde ou peut faire l’objet de vérifications supplémentaires.

Cette histoire de visa va même encore plus loin, car paradoxalement une grande majorité des journalistes internationaux comme ceux de France 24 embauchent des journalistes indiens locaux pour traiter un sujet de peur d’avoir des soucis de renouvellement de visa. Cette technique d’enquête met à rude épreuve le pluralisme médiatique.

Les moyens de pression de Modi sont divers et variés. Assassinats comme avec Shujaat Bukhari, passages à tabac, emprisonnements comme pour Kishorechandra Wangkhem, menaces de mort sur la famille ou encore incitation à la haine sur les réseaux sociaux comme avec Aatish Taseer. Beaucoup de journalistes en ont fait les frais sur les dernières années.

20 journalistes emprisonnés en Inde entre 1992 et 2020. Selon l'infographie réalisée ci-dessous, les pays proches de l’Inde au classement RSF emprisonnent et tuent moins de journalistes. Exception faite pour le Myanmar qui a écroué plus de 230 journalistes en presque 30 ans. L’Algérie, le Pakistan et le Cambodge sont des meilleurs exemples dans ce domaine. Ils sont pourtant placés derrière l’Inde.

Le journaliste fondateur du quotidien Rising Kashmir fait partie des victimes du gouvernement Modi. Shujaat Bukhari réclamait des pourparlers et cessez-le-feu dans la région sous tension du Cachemire. En retour, il a été abattu par trois hommes armés et cagoulés à moto. En 2006 déjà, il avait échappé de peu à la mort. Pendant toutes ces années, il avait reçu des menaces de mort ainsi que des insultes sur les réseaux sociaux. Son travail était défini comme « une voix saine parmi les médias hypernationalistes ». Le gouvernement de Modi se permet de faire porter le chapeau de ces agressions et assassinats aux extrémistes musulmans ou aux intouchables.

Le 8 novembre dernier, le journaliste Aatish Taseer s’est vu retirer sa nationalité indienne pour avoir critiqué le Premier ministre Narendra Modi dans un article. Fils d’un haut fonctionnaire pakistanais qui  s’était fait lui-même assassiner pour avoir défendu la cause d’Asia Bibi et d’une célèbre journaliste indienne, le journaliste du Time a subi la pression du gouvernement. Taseer a qualifié Modi de « diviseur en chef » du géant d’Asie du Sud selon RFI, et ce pendant les élections législatives. Le gouvernement indien a justifié son acte en expliquant qu’il avait caché aux autorités que son défunt père avait des origines pakistanaises ce qui le rendait inéligible au statut « d’Overseas Citizens of India ». Étant donné qu’aucun n’Indien ne peut avoir la double nationalité, les journalistes indiens ou étrangers exerçant sur le territoire possèdent ce statut qui leur permettent de voyager, travailler et vivre en Inde sans visa. « Ils m'ont mis sur liste noire. Je ne peux plus venir comme citoyen ordinaire en Inde. Ma grand-mère a 90 ans et vit en Inde, il est possible que je ne la revoie plus jamais », a déclaré l'intéressé à la BBC.

Aatish Taseer ©Times of India

Aatish Taseer ©Times of India

Quant aux journalistes travaillant pour les médias locaux, lorsqu’ils ne sont pas jetés en prison, ils sont la cible fréquente de violences de la part des forces paramilitaires qui agissent avec le blanc-seing de New Delhi.

Pour éliminer ses opposants politiques et religieux, l’état indien a toujours eu la main leste. En 1984, le Premier ministre de l’époque lance l’opération Blue Star.

Les affrontements religieux au centre des violences contre la presse indienne

Par Hugo Deniziot

L’Opération Blue Star, qui a eu lieu en juin 1984, a été classée parmi les pires scandales politique par le magazine India Today. Cette intervention militaire avait pour objectif d’éliminer les sikhs séparatistes du Temple d’Or à Amritsar, soupçonnés d’avoir entreposé des armes et d’avoir établi leur quartier général dans l’édifice le plus sacré des sikhs.

Le Temple d'Or à Amritsar, où des centaines de personnes ont été tuées en 1984. ©Flavie Thivol

Le Temple d'Or à Amritsar, où des centaines de personnes ont été tuées en 1984. ©Flavie Thivol

L’opération militaire a subi de nombreuses controverses. D’une part pour la violence de l’attaque et le nombre de morts qu’elle entraînera (493 tués parmi les sikhs séparatistes et les civils selon le rapport officiel, plus de 1 500 selon d’autres estimations), d’autre part car l’assaut a été vivement critiqué par les sikhs du monde entier et qu’il aura entraîné la démission de personnes sikhes à de hauts postes dans l’administration indienne. Quatre mois plus tard, la Première ministre Indira Gandhi, qui a commandité Blue Star, sera assassinée par deux de ses gardes du corps, qui auront utilisé pas moins de 33 balles. Ironie du sort, ils étaient sikhs.

Le gouvernement indien a tenu à garder cette opération secrète. « La plupart de l’opération a été couverte par la presse papier via des informations et des photographies choisies par le gouvernement », nous apprend le journaliste Dipankar De Sarkar dans un article pour Live Mint. Tous les journalistes présents dans la région du Penjab lors de l’assaut ont été ramenés en bus à la frontière du Haryana, où ils y ont été abandonnés, et n’ont pas pu revenir dans la région durant l’assaut. De même, la région du Punjab fut placée sous couvre-feu, avec toutes les lignes de communications et de transport coupées. Résultat : « nul reporter n’a pu voir l’opération, la fusillade et les meurtres. Et le 7 juin, le lendemain de la fin de Blue Star, le journal le plus répandu dans le Punjab, The Tribune, la décrit comme ‘une opération sans accroc’[2] ».

Et puis soudain, la fin de l’omerta. Les informations, les témoignages commencent à apparaître, « principalement de journalistes indiens travaillant pour les médias occidentaux ». Ainsi, Bramha Chellaney, reporter pour l’Associated Press, rapporte que ce sont environ 1 200 personnes qui seront tuées dans l’assaut, en agrémentant son article de rapports d’autopsie. Elles font état de plusieurs personnes tuées par balles à bout portant et de sang-froid, les mains liées. L’article de Bramha Chellaney a notamment été repris dans le London Times.

Mais la publication de l’article de Chellaney ne sera pas sans conséquence. New Delhi accuse le journaliste d’avoir violé la censure de la presse du Penjab, d’attiser la haine et les troubles sectaires, et plus tard de sédition (incitation à l’émeute). Il sera le seul journaliste visé par ces accusations, alors que des journaux indiens publieront des articles similaires au sien. En septembre 1985, le gouvernement abandonnera finalement les charges contre Bramha Chellaney.

30 ans après la fin brutale du mandat d’Indira Gandhi, le Bharatiya Janata Party prendra le pouvoir et s’imposera dans le parlement. Depuis, le gouvernement Modi a fait preuve d’un intense activisme nationaliste hindou, qui se rapproche beaucoup de l’hindutva (ou hindouïté). Selon cette croyance, la terre sacrée des hindous est l’Inde, rendant illégitimes les Indiens chrétiens et musulmans, et les responsables des maux des hindous sont ces mêmes musulmans. Avec l’adoption du Citizenship Amendment Act et les affrontements qui s’en sont suivis, la haine envers l’islam et ses pratiquants a pris place dans la société indienne, parfois même incitée par des cadres du parti au pouvoir. Le 24 février dernier, Kapil Mishra a dirigé un rassemblement en faveur de la loi à Maujpur, non loin de l’endroit où se tenait une manifestation contre la loi. Lors de son rassemblement, il a lancé un « ultimatum » à la police de Delhi d’évacuer les manifestants contre la loi, sans quoi les pro-CAA le feraient eux-mêmes.

Les photos et vidéos qui circulent sur les violences dans les manifestations montrent des membres du Rashtriya Swayamsevak Sangh, un groupe paramilitaire dont l’idéologie est celle de l’hindutva, s’attaquer à des personnes (surtout des musulmans), armées de bâtons et d’armes à feu. Le 23 février notamment, des affrontements entre pro et anti-réformes ont pris place dans les quartiers nord-est de New Delhi, à majorité musulmane. Les vidéos et photos qui ont été prises ce jour-là montrent des actes de tortures, d’incendies et d’agressions de musulmans par des citoyens, la plupart du temps jeunes et se proclamant hindous. Certains montrent des signes d’affiliation au RSS. Kamran Shahid, étudiant en ingénierie à Bangalore, explique aux Observateurs que ses membres sont « reconnaissables à leurs slogans ou prières hindous ». Ils n’hésitent pas « à se filmer eux-mêmes et à mettre en avant leurs exploits », ajoute-t-il.

Les journalistes sont aussi victimes des violentes émeutes qui frappent les quartiers nord-est de la capitale. Une semaine après le début des affrontements, RSF nous apprend qu’un journaliste a été « touché par balle », un deuxième « a la mâchoire brisée », au moins quatre autres reporters ont été « blessés » et « plus d’une dizaine de professionnels des médias ont été victimes d’intimidations particulièrement virulentes ». Daniel Bastard, responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF, affirme que « les forces de police ont fait preuve d’une passivité face aux attaques de journalistes par les émeutiers qui confine clairement à la complicité ». La journaliste de The Wire Naomi Barton dénonce le sentiment de peur ressenti par les journalistes présents pour couvrir les violences : « nous avons surtout essayé de dissimuler que nous étions journalistes. Je me contentais de filmer avec mon téléphone, et de ne pas sortir de matériel de reportage ». Mais cela n’a pas suffi. Naomi Barton a été arrêtée à plusieurs reprises par une foule hostile et forcée d’effacer ses vidéos. Ismat Ara, journaliste indépendante, a expliqué sur le site Firstpost comment elle a, elle aussi, échappé au lynchage : « je craignais, s’ils découvraient mon identité, qu'ils m’attraperaient parce que je suis journaliste, qu’ils me brutaliseraient parce que je suis une femme, et qu’ils me lyncheraient parce que je suis musulmane ».

Face à la non-réaction du gouvernement indien, le RSS continue de gagner du terrain dans les quartiers de New Delhi et dans le reste de l’Inde. Les faits de lynchage de musulmans se multiplient, les affrontements se font de plus en plus violents, les violences contre les journalistes ne cessent pas, et l’Inde semble jour après jour devenir une nation hindoue, quitte à exclure certains de ses citoyens.

Les "Intouchables" toujours tenus à l’écart du monde médiatique

Par Alexandre Pastorello & Martin Bizeray

La société indienne est divisée depuis de nombreux siècles en castes. On distingue une hiérarchie entre ces catégories sociales. Au total, elles sont cinq à régir la société indienne. Au sommet, on retrouve les brahmanes qui représentent 6% de la population, puis les Kshatriyas et les Vaishya qui sont les strates intermédiaires 19% et enfin les Sudras, 50%. Une dernière catégorie de personnes existe, il s’agit des Dalits ou Intouchables qui représentent un quart de la population indienne. Les personnes issues de cette dernière sont considérées comme impures et sont mises à l’écart de la société indienne.

Dès la naissance, chaque indien est assimilé à sa catégorie sociale. Celle-ci va le suivre durant sa vie entière. Selon la loi indienne, toute discrimination liée à la caste d’une personne est interdite. Cependant la réalité est toute autre. Chaque année, de nombreux crimes sont commis en raison de cette division hiérarchique. Principales victimes de ces derniers, les Indiens issus des castes inférieures également appelés les Intouchables. Chaque catégorie doit respecter certaines traditions : tout d’abord l’endogamie, c’est à dire l’obligation de se marier avec une personne issue de la même classe.

Auparavant, elles définissaient le travail auquel chaque indien était destiné. Ce n’est plus vraiment le cas notamment avec l’arrivée des nouveaux métiers qui ne sont pas liés à une catégorie en particulier. Il est cependant difficile pour les Indiens issus du bas de l’échelle sociale d’accéder aux métiers à responsabilités.

On ne sait pas dater précisément l’origine de la société de caste en Inde. Cependant, cette dernière a évolué au cours du temps. Cette division sociétale telle que nous la connaissons aujourd’hui trouve son origine au XIXe siècle. Elle est l’héritage des grandes modifications qu’a subi l’Inde à cette période notamment avec la colonisation britannique. On observe cependant l’utilisation du terme au XVIe siècle par les colons portugais. Il serait un dérivé du portugais casta. Il est utilisé essentiellement par les Occidentaux. Les Indiens privilégiant les termes varna ou encore jati. Varna étant utilisé pour définir les Indiens appartenant à une caste et jati qui signifie “sous-caste”. Même si ce système est toujours omniprésent en Inde, des lois tentent de faire réduire les inégalités entre classes.

En 1950, suite à l’indépendance de l’Inde, il est inscrit dans la constitution que toute discrimination liée à la condition sociale d’une personne est interdite. Des quotas sont également mis en place pour garantir l’accès aux métiers de la fonction publique aux intouchables. Depuis 2006, ces quotas ont même été étendus aux Sudras, la caste juste au-dessus des Dalits. Ils représentent 50% de la population indienne. En 1997, un dalit a même réussi à accéder au poste de président, Kocheril Raman Narayanan. Cependant ce dernier n’a qu’un pouvoir représentatif.

Les intouchables ou dalits (opprimés) sont la strate la plus inférieure de la société indienne, ils sont même en dehors du système hiérarchique de caste.

Selon les derniers chiffres du recensement de 2011, ils seraient 201,4 millions (soit 16% de la population) dans un pays qui en compte 1,2 milliard. Selon certaines associations comme  ISDN (International Solidarity Network) si l’on ajoute les Dalits chrétiens (15 à 20 millions d’individus) et  musulmans (100 millions d’individus), les chiffres sont d’autant plus significatifs. Ainsi en complétant les statistiques, la part de Dalits dans la population passerait à 25% pour 300 millions d’individus.

En 1950, la constitution interdit par l’article 15 toute forme de discrimination envers l'âge, le sexe, la caste et le lieu de naissance et l’article 17 abolit le mot intouchable au profit de “dalit” (opprimés). Mais malgré ces dispositions législatives, ils restent les parias de la société indienne. Ils sont cantonnés aux travaux les plus ingrats tels que nettoyeurs de toilettes, dépeceurs d’animaux, prostitution… Ils font preuve d’une réelle discrimination systémique, la majorité des meurtres, des violences, des viols sont dirigés contre eux.

Comme le prouve cette infographie, les Dalits ne sont pas intégrés dans la société indienne. Ils sont même clairement discriminés puisqu’une grande partie d’entre eux ne jouit pas, par exemple du confort de base tel que l’accès à l’électricité, l’eau potable ou encore aux sanitaires. Que ce soit, le niveau de revenus, de justice ou de santé ils sont délaissés par l’État indien. Le niveau d’accès à l’éducation est lui aussi inférieur à la moyenne nationale. Et cela vaut aussi pour le journalisme.

Les Intouchables sont exclus de la société en général, cela comprend également l’espace médiatique. Considérés comme des personnes “impures”, les intouchables sont quasiment absents des rédactions en Inde. Leur situation n’est traitée que par des journalistes issus de strates supérieures.

Dans un article intitulé Les médias indiens veulent des informations sur les Dalits, mais pas de journalistes Dalits paru en 2017 sur le site Al Jazeera, le journaliste Sudipto Mondal dénonce le manque d’accès aux médias pour les intouchables. Ainsi la première école de journalisme du pays, l’Asian School of Journalism a décidé pour la première fois lors de la rentrée 2016-2017 d’intégrer des intouchables. Pour autant le journaliste dénonce le fait que l’institut n’est pas prêt à les accueillir , il existe trop de différences entre le bas et le haut de l’échelle sociale.

 Le langage, le revenu, les habitudes, ainsi que le nombre ultra minoritaire d’étudiants de classes inférieures créent une inévitable discrimination. Et ce n’est pas le prix élevé de l’école qui va ramener l’égalité, pour une année il faut dépenser pas moins de 2 millions de roupies soit (30.800 dollars).

Par ce biais mécanique, moins il y a de Dalits étudiants en journalisme, moins il y a de journalistes professionnels venant de cette minorité. Sudipto Mondal a mené l’enquête pendant dix ans à la recherche de journalistes issus des intouchables. Il dit : “avoir été capable d’en trouver seulement huit”. Seulement deux ont effectué leur coming out, si ce terme s’attache à la révélation de son homosexualité en occident, en Inde il se rattache à la révélation de sa condition d’Intouchable. Si ce taux est si faible, c’est aussi parce que lorsqu’un d’entre eux arrive à s’élever dans la hiérarchie sociale, il préfère cacher sa condition.

Ce manque d’accès aux études de journalisme ne leur permet pas de s’exprimer et d’occuper l’espace médiatique. Le quart de la population est exclu du système d’information en Inde. C’est un véritable problème par rapport à la liberté de la presse, car on peut estimer qu’il s’agit d’une forme de censure systémique.

C’est qu’en Inde l’information est à l’image de la société, c’est à dire hiérarchique et excluant les plus faibles. L’information mainstream est par ailleurs portée par des médias pro gouvernement. Ce constat Alban Alvarez, correspondant français pour France 24 en Inde le partage : “En Inde les Godi Medias, sont des médias qui roulent pour le gouvernement [...] ils publient énormément de fake news, c’est un gros problème bien plus qu’aux États-Unis ou en Europe”. Au-delà de la propagation de fausses nouvelles, ce système d’information mainstream et pro gouvernement empêche clairement la diversité médiatique. Et par extension l’inclusion sociale, notamment des Dalits.

Il existe certains médias indépendants à l’image de The Wire ou The Print qui n’hésitent pas à critiquer ouvertement le gouvernement, mais selon Alban Alvarez ces derniers subissent un lot de pression important : “The Print par exemple est un média qui n’est pas pro gouvernement et clairement, ils en prennent plein la gueule [sic]”.

En Inde le système de caste continue de privilégier les brahmanes et de perpétuer une élite intellectuelle et médiatique. Une bulle dans laquelle les Dalits ne sont pas conviés. Pourtant les médias anglophones considérés comme mainstream commencent peu à peu à parler des plus infortunés. Une tendance que décrit Sudipto Mondal : “Dix ans en arrière les médias ne voulaient pas parler des atrocités faites aux musulmans, Dalits et Adivasi, il n’y avait pas de journalistes pour faire cela. Aujourd’hui, les reporters sont envoyés par des avions et des taxis réservés pour reporter le moindre incident dans les détails les plus intimes.”

Si cette tendance évolue peu à peu c’est, car la voix des Dalits commence à se faire entendre dans le pays. Grâce aux réseaux sociaux, leur expression n’est plus censurée et partout dans le pays, des influenceurs relayeurs de la cause apparaissent. Ainsi de nombreux journalistes indiens se posent en défenseur de la cause. Si une telle chose arrive c’est grâce à internet. De nombreux médias pro-dalits se créent, internet est le seul endroit où ils peuvent s’exprimer librement. La chaîne Youtube Dalit Camera en est un exemple concret, créé en 2012, elle prône un regard subjectif sur la société indienne par le prisme des Dalits. On peut également citer Round Table India ou encore Velivada.

Mais ces médias sont récents et ne trouvent pas un écho suffisant pour être considéré d’importance nationale. Ils manquent également de moyens pour émerger en tant que réel contre-pouvoir médiatique.

Cela est dû également à un autre phénomène. Si de plus en plus d’informations traitent de la cause des Intouchables, c’est car ils ont désormais un poids électoral. Depuis 1997 et l’élection du premier président Dalit à la tête du pays Kocheril Raman Narayanan, la minorité commence à rentrer dans les institutions politiques. Ainsi en 2017, lors de la dernière élection présidentielle, le parti au pouvoir le Bharatiya Janata Party a présenté un candidat dalit Ram Nath Kovind. Ce politicien était encore presque inconnu avant d’être élu président en 2017 avec 52% des voix. Même s’il s’agit d’un symbole très fort pour la communauté, cette élection est en réalité le fruit d’un jeu politique. Le parti du Premier ministre Modi faisait face à une révolte de la population musulmane hostile aux mesures nationalistes du gouvernement. Le choix d’un candidat intouchable est en réalité une décision politique pour s’assurer d’un réservoir de voix soit 16% de la population. 

Par ces biais la population Dalit est clairement exclue que ce soit dans les rédactions ou dans le traitement de l’information. Cela ne fait que renforcer la condition dont ils pâtissent depuis la naissance. Ces fléaux empêchent un réel pluralisme de l’information en Inde puisqu’on n’intègre pas et on ne parle pas à près de 300 millions d'indiens, qui plus est ceux qui sont en difficulté.

Au lendemain de l’indépendance du pays en 1949, la constitution indienne de 1950 s’établit dans une forme de paradoxe. D’un côté, elle refuse toutes formes de discriminations et décrète que tous les citoyens sont égaux, faisant fi du système de caste. Pourtant ce texte fondateur accorde davantage de place aux Dalits dans la société. Si tel est le cas, c’est parce que le père de ce texte est lui-même issu de cette strate inférieure. Le docteur Ambedkar a ainsi proposé dans ce texte une mesure qui à l’époque devait être temporaire, à savoir l’instauration de quotas pour la population Dalit (qui devait durer 20 ans, jusqu’en 1970). Si ce système de “réservations” est toujours d’actualité en Inde, c’est parce qu'il permet une lente élévation sociétale de cette population opprimée. Dans les faits, 24.5 % des emplois publics et l’accès à l’université sont réservés à cette population, et ces quotas ne doivent pas dépasser 50%. Mais dans certains états, à l’image de l’Uttar Pratesh, le plus peuplé du pays (200 millions d’habitants), le BSP qui possède un électorat principalement issu des basses castes est parvenu à briguer le pouvoir.

Grâce à cette politique, certains dalits ont pu avoir accès à des études dont ils n’ont pas accès en temps normal, par exemple en journalisme et ainsi avoir l’espoir d’intégrer des médias. C’est le cas de Yashica Dutt. C’est l’une des seules journalistes connues à avoir effectué son “coming out”. Grâce au système de discrimination positive et à une bourse elle a pu obtenir en 2007 son diplôme dans l’une des plus prestigieuses institutions du pays : le St Stephen’s College de New Delhi. Après plusieurs piges dans des médias indiens reconnus comme The Wire, le Huff Post India, Live Mint et le Hindustan Post, elle part étudier aux États-Unis. Elle obtient ainsi son diplôme en journalisme à l’université de Columbia en 2015. C’est en 2017 qu’elle devient une figure de proue de la cause Dalit lorsqu’elle publie son livre Coming Out As Dalit. À la suite du suicide en 2016 de l’étudiante Rohith Vemula qui fit grand bruit en Inde, Yashica décida de révéler sa condition en écrivant son autobiographie.

Cette Indienne originaire de Dehli vit désormais aux États-Unis où elle travaille en tant que journaliste freelance. Cette dernière considère cette politique comme positive, car elle permet l’intégration progressive de Dalit dans les rédactions. Yashica juge que : “ La politique d’inclusion à travers les bourses est bonne, mais pas assez développée, il faut augmenter la représentation des minorités pour que les médias indiens soient moins biaisés et réservés à une élite”.

Yashica Dutt explique la discrimination subie par les dalits dans les rédactions.

Yashica Dutt explique la discrimination subie par les dalits dans les rédactions.

Mais elle estime cependant que la discrimination envers cette population est toujours très forte en Inde ce qui explique pourquoi très peu de journalistes Dalit révèlent leur condition sociale.

Pour Yashica Dutt, il faut aussi encourager la diversité dans les rédactions indiennes. Pas seulement en incluant des personnes issues des basses castes, mais également en incluant des journalistes de confessions musulmanes qui sont encore trop peu nombreux à son goût. Elle considère que toutes les catégories sociales et religieuses devraient être représentées au même niveau et que les médias mainstreams ne devraient plus être réservés à une élite.

“ L’accès aux médias est difficile pour les personnes issues des castes inférieures, mais plus généralement pour les Indiens issus de milieux modestes et des milieux ruraux”.

En Inde, plusieurs associations étudiantes plaident la cause des Dalits. Parmi elles, ASA Mumbai qui prône également une politique d’inclusion par des bourses et des quotas. Ces derniers demandent des aides au gouvernement “Il faudrait que le gouvernement propose des aides économiques aux Dalits qui souhaitent créer leur propre média, car le problème est avant tout économique”, explique le porte-parole de l’association.

Il faut selon eux encourager les collèges privés de journalisme à accepter plus d’étudiants des castes inférieures et défavorisées financièrement. Pour eux, l’inclusion et la diversité sont essentielles. Leurs idées se rapprochent de celles défendues par Yashica Dutt. La discrimination positive est selon l’association essentielle :  actuellement, les journalistes des médias mainstreams en Inde sont plus ou moins tous issus des mêmes catégories sociales et le message délivré est biaisé.

Ces facteurs sont le signe d’une évidente amélioration de la cause, pour autant, ce système de quotas est source d’un réel débat en Inde. D’un côté, le caractère positif de la mesure datant de 1950 ne semble plus adapté à la société contemporaine. Le fait est que les Dalits représentent 200 millions d’individus et qu’au sein de la minorité il existe de fortes disparités. Que ce soit de revenus, de situation géographique, on estime ainsi que même au sein des intouchables il existe des “sous catégories” s’apparentant aux classes supérieures.

D’un autre côté, ce système fait des émules dans les castes les plus inférieures, ainsi certains se déclarent comme étant dalits pour pouvoir bénéficier des “avantages” dont ils bénéficient.

Par ailleurs si ces quotas peuvent laisser penser que mécaniquement plus les Dalits sont éduqués plus ils peuvent accéder aux emplois intellectuels à l’image du journalisme, en réalité ce n’est pas le cas. L’élite médiatique du pays est principalement anglophone et due à leur manque d’éducation les Dalits ne le sont que trop peu. D’autre part, dans les médias il n’existe pas de quota dans les rédactions pour intégrer les intouchables. Au contraire même, les rédactions mainstream ne semblent pas suivre le mouvement de discrimination positive initié par l’état. Comme le montrent les travaux de Sudipto Mondal, être Dalit dans une classe supérieure à l’image des médias reste encore un tabou.

CONCLUSION

Le classement Reporter Sans Frontières classe les pays selon sept critères comme le pluralisme du paysage médiatique, la transparence des institutions et procédures impactant l’information et l’intensité des violences sur la période mesurée. Dans le cas de notre enquête, nous avons vu que les médias se soumettent au pouvoir pour ne pas subir de répressions ou par soutien et attachement aux valeurs du parti nationaliste hindou. Des institutions contrôlent les médias comme le ministère de l’information et de la radiodiffusion et les ambassades font de la pression. Enfin les violences lors des manifestations et les émeutes intercommunautaires se sont étendues dans tout le pays ayant fait au total environ 50 morts. Nous pouvons donc dire que le pays mérite sa 140ème place au classement. 

Le 3 mars 2020, la Haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Michelle Bachelet s’est exprimée à propos de la crise que traverse l’Inde. Elle a demandé à la Cour suprême indienne de participer au recours en justice contre la loi CAA. Le gouvernement a mal reçu cette proposition affirmant qu’il s’agit « d’une question interne à l’Inde ». La crise entre la communauté hindouiste et musulmane ne compte pour l’instant pas s’essouffler. 

Il y a un autre problème concernant la liberté de la presse qui n’est autre que le résultat des décisions politiques et religieuses. Les femmes sont trop peu représentées dans les médias et ont peu accès au métier de journalistes. La religion hindouiste reste profondément discriminatoire que ce soit envers les classes inférieures ou les femmes. 

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